Quand le plus grand projet au monde déçoit

Le projet de captation et de stockage du carbone baptisé Gorgon peine à atteindre les objectifs étudiés avec le gouvernement australien.

En Australie, Chevron cherche à développer ses procédures de décarbonation. Pour ce faire, le projet de CCS Gorgon a été mis en place. Premier projet de cette envergure dans le monde, il peine pourtant à atteindre ses objectifs.

Trois années d’attente non récompensées

Le projet de CCS en Australie ne fonctionne qu’à la moitié de sa capacité. Ceci, près de trois années après son démarrage. Selon un cadre supérieur, Chevron n’aurait pas de plan B à fournir. Le projet paraît être une déception.

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Interrogé par Reuters, il explique que la société « n’a pas de calendrier pour accéder aux objectifs jusqu’à présent non atteints. » Le projet a été conçu pour enfouir 4 millions de tonnes de CO2 par an. Pour l’instant, seulement 2,1 millions de tonnes ont été placées dans les espaces souterrains dédiés en 2021.

Une déception d’autant plus grande que le site de Gorgon exploitant du GNL est situé dans une réserve naturelle. Vieille de plus d’un siècle, la réserve naturelle de classe A nécessite l’accord de plusieurs acteurs gouvernementaux pour y ouvrir un projet industriel.

Par ailleurs, le gouvernement australien s’était « engagé à verser 60 millions de dollars au projet d’enfouissement de dioxyde de carbone », selon un communiqué de Chevron Corp.

Difficulté dans la gestion de la crise environnementale en Australie

Estimé à plus de 2 milliards de dollars, les résultats du projet Gorgon ne satisfont pas le gouvernement australien. En réponse, Chevron annonce vouloir investir plus de 40 millions de dollars australiens dans des projets à faible émission de carbone. En outre, l’entreprise indique mettre les moyens nécessaires pour remplir ses obligations.

Néanmoins, Chevron n’est pas la seule entreprise dans cette situation. Cette dernière a dépensé $137 millions en compensation carbone fin 2021. Le reste de l’industrie australienne semble également à la peine, en atteste l’augmentation record du prix des compensations carbone en 2021.

Publié en août 2021, l’Australie avait déjà été pointé du doigt pour son inaction climatique. L’Australie est le pays de l’OCDE avec les moins bonnes performances globales « en matière de transition énergétique ». Ce constat avait été réalisé lors d’un rapport de l’Australia Institute analysant des données comprises entre 2005 et 2019.

Le CCS, une innovation jugée essentielle

Ce projet de CCS avait démarré avec trois ans de retard. Ce dernier est suivi de près par l’industrie gazière mondiale. Le procédé est considéré comme essentiel pour atteindre les objectifs de neutralité carbone, d’ici à 2050. Kory Judd, directeur des opérations de Chevron Australie, a déclaré à Reuters :

« Il n’y a aucun moyen d’atteindre les objectifs de 2050, où que ce soit dans le monde, sans que le CCS n’en fasse partie. »

Les projets de CCS se traduisent par un traitement du dioxyde de carbone émis par les industries. Une fois récupéré, ce dernier est enfoui dans des poches souterraines. Cette technique connaît cependant quelques contestations, notamment via l’étanchéité des zones d’enfouissement.

Pour sa première évaluation quinquennale, le projet Gorgon CCS devait, initialement, être pleinement opérationnel l’année dernière. Au lieu de cela, Chevron a été contraint de payer ses crédits carbone pour n’avoir pas atteint ses objectifs. En novembre 2021, Reuters évoquait une somme équivalente à plus de 180 millions de dollars à verser.

Des espoirs reconduits pour les projets de CCS

Pour Reuters, le directeur des opérations de Chevron Australie, Kory Judd, a évoqué les efforts qu’il devait encore fournir. Chevron chercherait à développer d’autres projets du genre, selon l’agence de presse. À l’aube de la conférence australienne sur la production et l’exploration pétrolière, il déclare :

« Nous avons encore du chemin à parcourir pour respecter l’engagement de ce pour quoi nous avons conçu le système d’injection. […] Ce que nous faisons, c’est essayer d’apprendre comment injecter du CO2 dans les réservoirs. Savoir comment ils réagissent, puis le faire de manière fiable et arriver à respecter les engagements que nous avons pris. »

Pour lui, les projets de CCS restent fiables, la variable à régler se situerait sur « la mise à l’échelle ». Voulu comme le futur plus grand site de CCS au monde, d’autres grands projets vont voir le jour dans ce secteur jugé prometteur. En janvier 2022, la Chine finissait son premier « Megaton CCUS Project », absorbant 1 million de tonnes de CO2, alors qu’ExxonMobil investissait $100 milliards dans ces technologies en 2021.

Au vu des engagements pris durant l’accord de Paris, certaines industries comptent énormément sur les programmes de CCS. Importants producteurs de C02, les secteurs de l’acier, du ciment et de la pétrochimie se penchent fortement sur ses opportunités. Avec nos technologies actuelles, ces domaines ne peuvent s’empêcher de produire du dioxyde de carbone, le captage et stockage de ce dernier devenant alors indispensables.

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